• Ces Français qui partent faire le jihad en Syrie

    Ces Français qui partent faire le jihad en Syrie

    Le nombre de candidats au jihad a fortement augmenté en France ces derniers mois: fin avril Laurent Fabius a estimé qu’environ 500 Français sont partis en Syrie pour combattre aux côtés de groupes jihadistes.

    Plus inquiétant, le ministre constate une augmentation de 75 % du nombre de ces combattants en quelques mois. Dans son ouvrage Les Français jihadistes,le journaliste David Thomson les appelle les « petits soldats du djihad ». Ancien correspondant deFrance 24 et RFI en Tunisie et réalisateur de Tunisie, la tentation du jihad, un documentaire sur l'organisation Ansar Al Charia, David Thomson vient de publier aux éditions Les Arènesune enquête sur ces « enfants de la République » ou il a recueilli des informations inédites de la bouche même des jihadistes français qui partent en Syrie.

    La Voix de la Russie. Qui sont ces Français qui partent faire le jihad en Syrie et quelles sont leurs motivations ?

    David Thomson. « Les motivations des gens qui vont en Syrie sont multiples. D’abord, ils ont tous la conviction qu’une grande prophétie mondiale est en train de se jouer actuellement sur la terre de Syrie, qu’on est à l’aube de l’Apocalypse et du retour du Messie sur terre. Et donc pour eux, il faut absolument être en Syrie parce que c’est là que ce Messie viendra. Au-delà de ces raisons prophétiques qui font de la Syrie une terre sacrée, il y a cette envie de créer un Etat islamique, un califat qui sera un garant de l’application d’une vraie charia, à leurs yeux une charia authentique. Et puis la Syrie est une terre du djihad obligatoire parce que des musulmans y sont massacrés par des gens qui ne sont pas musulmans, en l’occurrence par les chiites qui ne sont pas musulmans. A cela s’ajoutent également des raisons plus individuelles telles que les frustrations sociales et religieuses. Ils ont tous l’impression qu’en France, qui n’est pas une terre d’islam, il est impossible de vivre sa religion. Pour eux, le fait de vivre en terre de mécréance souille le musulman et l’empêche d’accéder, à terme, au paradis. Il faut partir pour vivre là où l’on applique la charia littérale, c’est-à-dire, en ce moment, uniquement sur des terres où l’on combat comme en Syrie. C’est une obligation religieuse à leurs yeux.

    LVdlR. Selon Laurent Fabius, 500 jihadistes français combattent maintenant en Syrie. D'après le ministre des Affaires étrangères, ce départ de Français pour la Syrie n'est nullement « une situation nouvelle ». Mais il a indiqué qu'il y a des « différences » car « les gens partent plus nombreux » et ils sont plus jeunes. Est-ce que, selon vous, cela peut être lié au fait que le recrutement pour la Syrie se fait principalement sur internet et ce sont les jeunes qui sont impliqués le plus dans les réseaux sociaux ?

    David Thomson. « Oui, tout à fait et j’en ai la conviction absolue. En fait le phénomène est nouveau par son ampleur si on le compare aux chiffres de l’Afghanistan à partir du premier jihad afghan contre les soviétiques jusqu’au deuxième jihad contre les Américains au début des années 2000. Avec la Syrie on a maintenant des chiffres qui sont 10 fois supérieurs sur une période qui est beaucoup plus courte. La nouveauté aujourd’hui c’est que ce djihad en Syrie existe en même temps que les réseaux sociaux. Et l’internet fait le contact avec les jihadistes qui sont sur place très facile parce qu’il suffit de contacter un concitoyen sur Facebook pour lui demander comment faire pour le rejoindre. Et ensuite il va faciliter l’intégration du candidat sur place. L’internet touche le public plus jeune et plus large qu’avant. »

    LVdlR. Le gouvernement a dévoilé mardi les grandes lignes de son plan pour tenter de freiner le mouvement de départ vers la Syrie, dont la création d'un numéro vert, la mise en place d'une plateforme de signalement sur internet, la privation de passeports, etc. Selon vous, quelles mesures pourraient être efficaces ?

    David Thomson. « Aucune mesure n’est vraiment efficace. En réalité la France n’a jamais essayé vraiment d’empêcher les gens de partir parce que la stratégie des autorités françaises était de laisser partir ces gens et faire attention à leur retour. Cette stratégie a abouti à la situation actuelle quand les autorités sont submergées par les dossiers. Elles craignent le retour de ces jihadistes sur la terre française et s’attendent aux nouvelles attaques terroristes. Mais ce plan montre que le gouvernement français est en train de réaliser l’ampleur de la situation et de changer sa stratégie. Après ne rien avoir fait pour empêcher les départs, ils essayent de montrer qu’ils font quelques chose. » 

    Source :http://french.ruvr.ru/radio_broadcast/5646129/272400756/