• Malaisie : comment un boeing 777 peut-il disparaître ?

    Malgré le renforcement des moyens de recherches avec l’entrée en action de dix satellites chinois, le Boeing reste introuvable. Il aurait brusquement changé de route.

    Interpol a sérieusement mis en doute hier la piste terroriste dans le cadre de la disparition du Boeing 777 de Malysian Airlines. La police mondiale a en effet déclaré que ses investigations l’ont amené à déclarer : «Plus nous avons d’informations, plus nous sommes portés à conclure qu’il ne s’agit pas d’un incident terroriste», selon Ronald Noble, secrétaire général d’Interpol dont le siège est à Lyon.

    Les deux passagers voyageant avec des passeports autrichien et italien, volés en Thaïlande, sont deux Iraniens qui ont voyagé de Doha à Kuala Lumpur avec leurs passeports iraniens. Ils n’ont utilisé les passeports européens volés que lors de l’embarquement en Malaisie. Il s’agit de Pouri Nour Mohammadi, 18 ans, et Delavar Seyed Mohammad Reza, 29 ans. Interpol et la police malaisienne sont aujourd’hui persuadés que tous deux cherchaient à acquérir un statut de réfugié notamment en Allemagne pour Pouri Nour Mohammadi. Toutefois, le patron de la CIA n’écarte pas quant à lui la piste terroriste. John Brennan a affirmé hier qu’il n’excluait pas un lien avec une organisation terroriste.

    L'avion aurait été viré à l'opposé de sa route

    Pour bien orienter les recherches en mer, il est nécessaire de partir de la dernière position connue de l’avion. Or, les révélations de l’armée de l’air malaisienne sur la trajectoire de l’avion sont des plus étonnantes. Alors que la dernière position avant sa disparition était jusqu’à présent au large de Kota Bharu, sur la côte orientale malaisienne, l’avion aurait totalement changé de route pour obliquer au sud-ouest, à l’opposé de sa direction originelle. «L’appareil a changé de direction après Kota Bharu et a volé à plus basse altitude. Il est allé vers le détroit de Malacca», a révélé un responsable militaire. Le chef de l’armée de l’air Rodzali Daud a assuré que le Boeing a été détecté pour la dernière fois par un radar militaire à 02 h 40 samedi dans le nord du détroit de Malacca. Il volait alors à 9 000 mètres. Un changement de cap totalement incompréhensible qui est en train d’être vérifié par le département de l’Aviation civile et l’équipe chargée des recherches. Sur place malgré l’intensification des recherches avec dix satellites chinois, l’avion restait introuvable hier.


    Les téléphones sonnent toujours

    L’information selon laquelle les portables de plusieurs passagers continuaient à sonner alors que leurs familles tentaient de les joindre a semé le trouble. La compagnie aérienne Malaysian Airlines a donc, à son tour, tenté de joindre les membres d’équipage du vol MH 370. Et les mêmes causes ont produit les mêmes effets : les téléphones portables des pilotes, hôtesses et stewards ont bien une tonalité mais personne ne répond. Surprenante, cette tonalité pourrait s’expliquer par un défaut technique dans le réseau de relais de téléphone portable qui accueille ces appels sortants de Chine et de Malaisie. Par ailleurs, si certains passagers n’avaient pas éteint leur téléphone, la tonalité qu’entendent les appelants est celle de la dernière borne qu’a activée le portable mais pas celle du portable lui-même. Les familles, en plein émoi, réclament qu’on localise les téléphones de leurs proches grâce à la méthode de triangulation. Une méthode qui ne fonctionnera toutefois pas car les téléphones doivent être allumés pour les localiser.


    Michel Polacco, pilote, journaliste spécialiste aéronautique et espace

    «Les recherches malaisiennes, c'est le foutoir !»

    Doit-on s’étonner du temps mis pour retrouver l’épave du Boeing de Malaysian Airlines ?

    Il faut se souvenir que pour le vol Rio-Paris, les recherches n’ont permis de repêcher les premiers débris que six jours après la disparition de l’Airbus d’Air France. Et pour y arriver, les autorités avaient utilisé des moyens très sophistiqués et notamment un avion Awacs bourré d’électronique qui volait à très basse altitude. Ce n’était ni les patrouilleurs, ni les bateaux de pêche et certainement pas des satellites qui avaient permis cette découverte.

    Les recherches ne sont-elles pas déployées de manière efficace ?

    L’organisation des recherches est tout simplement dramatique. Chacun agit dans son coin sans aucune coordination ni centralisation. Du crash du Rio-Paris, le Bureau d’Enquêtes et d’Analyses (BEA) a retiré des enseignements à suivre lorsqu’un avion s’abîme en mer. Tout d’abord, il faut agir très vite, ensuite il faut une autorité qui centralise tout et enfin il faut lancer les recherches à partir du dernier point connu de l’appareil. Aujourd’hui sur le Boeing disparu c’est le foutoir. Les Chinois lancent une flotte de satellites, la compagnie aérienne n’a toujours pas confirmé si l’avion était équipé d’un système Accars de liaison avec le sol… Dans ces conditions, ce n’est pas étonnant qu’on ne retrouve rien et les autorités locales ne se mettent pas en configuration pour trouver quoi que ce soit.

    Pensez-vous que la piste terroriste s’éloigne ?

    à ce stade de l’enquête, on ne peut éliminer aucune des trois causes principales : humaine, technique ou terroriste. Il faut des enquêteurs spécialistes de ces questions comme le sont les Français. Nos experts devraient être associés à l’enquête car ils ont l’expérience du vol AF 447. Frédéric Cuvillier a proposé l’aide du BEA aux Malaisiens qui est resté sans réponse.

    Que faudrait-il faire ?

    Il faut agir vite car les balises des boîtes noires n’émettent que durant trente jours. Dès à présent, il faut commencer à chercher sous l’eau. Les navires de recherches devraient traîner sous le niveau de la mer un hydrophone pour entendre le signal des boîtes noires et un sonar.